Okugake Shômudo 2011 part 2

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Journée 21 juillet***

 

 

66) OZASA-NO-YADO, la refuge d'Ozasa

Attention aux ravins qui bordent,le sentier de crêtes. On passe le mont Jizo-daké pour arriver au bout de quarante cinq minutes de marche, pour des individus normaux (4 kms) car les ascètes mettent moitié de temps, à une petite chapelle et un endroit pour le rite du feu. Auparavant l’école Tozan-shugen du temple Sanpoin-Daigoji y avait trente six temples. Il n’y a plus rien, si ce n’est le dallage en pierre. Par le passé les deux écoles-mères du Shugendo se querellant, les yamabushi d’obédience Shingon établirent leur camp de base non pas sur le mont Sanjo mais à Ozasa. Ozasa était l’unique endroit avant où l’on pouvait trouver de l’eau sur le mont Sanjo et celle-ci coule encore abondamment. Eau pour boire et "eau lustrale" pour offrir aux bouddhas chaque matin. Les écoles Honzan et Tôzan trouvèrent des compromis... Tous les ans, le 8 juin, les yamabushi du temple Sambôin de Kyoto et Ryusenji du village de Dorogawa viennent y faire la grande cérémonie du feu à l'extérieur et offrir des lotus à En-nogyoja. Il y a des rochers mousseux qui sont très confortables agréables pour y dormir, à l’Est de la chapelle ! On y vénère aussi une statue du moine Shobo qui se trouve à gauche, sous la falaise en arrivant La divinité principale de cette chapelle est Fudo Myo.

Poèmes du moine Saito:

« Mata konto omowa no histono ozasa hara. Kiri yorishi géki waga namida kana, iyori sasu kusano makurani tomonaité sasano tsuyunimo yadoru tsukikanaé

(Je souhaite revenir à Ozasa. Le nombre des larmes est plus important que les gouttes de rosée; la lumière de compassion est dans chaque goutte de rosée que contiennent les feuilles du bambou et dans lesquelles se reflète la lune). Par lune, il faut entendre le "cercle lunaire" (Gachirin*) de la lettre A, en trois dimensions, qui est assimilé aux milliers de gouttes de rosée.

 

«Onozukara nagaréni tatéshi chao sasagé ichono gyojani kuzuhisto amo sono taméni iyasaka étaru yumé arité miyama shimizu no otono mikasokéki »

Par ce court poème Saito sensei nous rappelle qu'à cet endroit, étaient dercernées les permissions officielles, car c’est ici que le moine Rigen Daishi mené par En-nogyoja lui fit rencontrer le Bodhisattva Ryuju (le saint indien Nagajurna) lors d'une "vision mystique". Ici demeure l’endroit pour prosterner son front devant les divinités suivantes : Daikoku-ten, Tamonten, Benzaiten, Kongo-Dôji (les enfants du vajra), Goma Sojo-Hondo (la divinité principale de l’oblation du feu, Foudo), Sonshi-Do (le Précieux maître du dojo, Jimpen) ; Gumonji-ryokai (la divinité des deux grands mandalas pour le rite du Gumonji, le bodhisattva Kokuzo, Seigneur de l’Espace), Dainichi-Sanjo-Ryusho (le précieux dragon du Sanjo, émanation de Dainichi).

 

Voici un poème à propos du dieu « Grand sombre », du Daikokuten d’Ozasa-noyado:

« Fuku toku wa kami no kokoro no nanarikéru yokuniwa idé no Daikoku no chushi »

(La vertu du bonheur est le nom de ce dieu et même si le marteau est mon bonheur, rien ne vient du marteau de Daikoku)

 

Voici un poème concernant la venue des yamabushi pour assister à la cérémonie du feu à Ozasa :

« Ochi kochi no histoya bodai no kazutsumité nao tanomi aru shokaku no jo »

Les yamabushi aiment la voie d'En-no-gyoja, qu’importe la distance, ils viennent de toutes parts. Pour briser l’ignorance, ils font le miné-iri qui leur indique la direction du satori, tout en répétant : Pénitence, purification de nos six sens (Zange-zangé-rokkon-shojo), pas à pas (ippo-ippo) ils parviennent au lieu de l’oblation du feu qui est nommé "le four" Shokaku, qui est le lieu d’éveil !

 

Une fois, Saïto sensei fût malade et ne put se rendre dans les monts Ominé au printemps. Alité, il écrivit ce poème :

"Hora no néni kokorowa asété Ominé no icho Otokéo ko iwataru nari …Ko iwararu ozasa no icho no miotokéwa yumé no manimani waréo izanao”

(Entendre le son de la conque et accourir par l’esprit…dans les délires de la fièvre, le Bouddha survint plusieurs fois pour me dire de venir)

 

A Ozasa-no-yado se trouve une très belle statue en bronze du moine Shôbô qui semble sourire. Il est considéré comme une incarnation du bodhisattva de compassion Nyoirin-Kannon (Kannon qui verse la Connaissance). Ce moine devint grand Archevêque du bouddhisme Shingon et du Shugen de l'école Tôzan. Il oeuvra beaucoup pour rénover le shugendo et ses sentiers de montagne concernant le mandala naturel.

Devant sa statue, il arrive que des yamabushi du Ryusenji lisent le poème suivant :

«Nigoro yono shujo sukû karagoromo honchi Nyoirin Kannon no jihi »

(Pour guider les fidèles dans ce monde confus, le bodhisattva Nyoirin-Kannon a changé d’apparence)

«Mada kondo omowa no histo no Ozasa hara tsuyu yori shigékiwa a namida kana”

(Tout en venant de Kumano, très fatigué, je souhaite revenir à Ozasa, les larmes de joie sont pareilles aux pluies de la mousson)

 

Les deux poèmes suivants sont de Saito sensei :

« Aruku no mi, tada aruku no mi, mono nabété méni todo marazu miné yuku warewa”

(Marcher, rien que toujours marcher…ne pas fermer les yeux, pas le temps d’apprécier la montagne, c’est ainsi)

Il l’est vrai, pour avoir parcouru cette montagne pour ma part aussi des centaines de fois, en long, large et travers, il est toujours recommandé de marcher en regardant les dangers du terrain, si bien que l’on doit passer des dizaines d’heures de marche, menton baisser pour voir le sol et il faut attendre que le terrain soit bien mémoriser pour commencer seulement à se redresser le buste...

« Tsuyu shigéki hicho ni senko no rei ari. kokoro sayakani goma shushimatsuru. Masashikumo wagamini, susuru goma naréya namida ni kasumu miotoké no kau »

(La rosée, les pluies de mousson sont importantes, de même il y a toujours des endroits secrets merveilleux pour offrir l’encens. L’esprit doit faire le rite de l’oblation du feu sacré de façon solennelle. Quant à la pratique de l’oblation du feu pour moi-même, mes yeux pleins de gouttes de pluie (larmes) ne permettent pas de voir le bouddha, mais je le ressens). Les gouttes de pluie des typhons, la rosée, les larmes sont ici des symboles exprimant le « sentiment de bénédiction divine » (Kaji ou Adhistana en scrt) très important dans l’ésotérisme bouddhique.

 

Un peu en contre bas, avant Ozasa-no-yado, se trouvait sur les pentes du Mt Sanjo, un autre endroit où était vénéré les trente-six Kongo-Dôji (36 enfants du vajra). Il y avait un gîte et un temple. L’endroit s’appelait : «kawa-ai-no-yado», un haiku y est rattaché : «Rokkon no gyakuto kiru oya sato suran kari no yado rini nani todomubéki » (les hôtes qui reçoivent l’enseignement sur les six organes des sens et comprennent que ce corps n’est qu’une location, pourquoi garder quelque chose). C’est l’endroit où En-no-gyoja avait projeté le bodhisattva Jizo. On marche ensuite durant deux kilomètres sur un sentier fort agréable. C’est le domaine des biches, daims, sangliers et ours (tsuki-no-waguma), ceux qui portent un V blanc sur l’encolure. On arrive ensuite à la porte sud du Nyonin-kékkai, marqué d’un portique en bois. Fini le terrain plat, la marche souple, on descend dans un vallon.

in august 2008, a strange Light during few minuts just before the South Gate...

 

 

65) AMIDAGA-MORI (la forêt du bouddha Amida)

C’est une forêt aérée sur un vallon, commençant au portique sud. Un endroit où se dresse un chêne très vieux près d’un tumulus de pierres et une mare où abondent des gros crapauds en été. C'est un arbre où l’on accrochait des tablettes votives (Ofuda) tous les ans! Il était donc maculé d’inscriptions japonaises, ce qui lui donnait un charme particulier, un peu magique. A présent , les yamabushis déposent ces tablettes votives au pied de l'arbre. « C'est un arbre pour les "sabbats" des sorcières les jours de pleine lune », ais-je pensé les premières fois où je me suis trouvé en sa présence. C’est un endroit reposant mais où les serpents abondent. De là, à trois cents mètres sur la droite, il y a un sentier qui monte de la vallée du village de Kashiwagi. Le sentier se poursuit par de petits vallons. Le chemin, que recouvrent les herbes hautes, est dangereux car ses détours longent les falaises avec des ravins de cent mètres. A un kilomètre de là, se trouvent d'anciennes ruines que la mousse à recouvert et près desquels les yamabushi font une brève halte pour se désaltérer ! C’est le n°64.

 

64) WAKI-NO-YADO (la hutte de l'aisselle)

A un kilomètre du N°65, à cause des bambous nains qui s’y trouvent encore, il fût longtemps appelé Sasa-no-yado. Quelques ruines se trouvent un peu à l’écart du chemin, au-dessus de la falaise, le temps pour le responsable d’aller y déposer les tablettes votives dans une niche au-dessus d’une falaise qui donne sur la grotte de Shô ! Les autres yamabushi en profitent pour se désaltérer avant un passage étroit et délicat qu’il faudra emprunter pour se rendre sur l’autre montagne. C’est un endroit encore enneigé jusqu’à la mi-mai. On y rencontre quelques fois des sangliers. Auparavant, d’Ozasa jusqu’ici, il était interdit d’ouvrir la bouche, si ce n’est pour les prières. Les yamabushi faisait l’ascèse du silence" mugo-no-gyo".

Poème ancien du Shugen:

«Shiku wakaré Ozasa no tsuyuni yôkomété waki no yado ni wa nokoru tsuki kagé »

(Lorsque l’on quitte la rosée d’Ozasa, à Waki-no-yado, on peut apercevoir l'ombre de la lune dans le restant des gouttes)

On passe deux goulets et on débouche sur un petit mont : le Ko-Fugen-daké, une trouée pour voir sur la montagne en face et cette toute proche du mont du bodhisattva Fugen (Samanthabarda en scrt). On y laisse une tablette votive et l’on continue à suivre le sentier, passant parfois par des endroits délicats jusqu’au n° 63. Il y a ensuite à cinq de marche, un passage délicat faisant face au Grand Mont Dai Fugen-daké.

the halte of Wakki

 

63) KÔ-FUGEN-NO-YADO (la hutte du Fugen) Du Ko-Fugen, on aperçoit au loin le sommet de la crête du Mt Sanjo...

35 minutes du 64. A mi pente du sommet du mont Fugen se trouve cet arrêt. A gauche, le chemin bifurque pour redescendre par une pente raide, parfois semée d'échelles en fer, jusqu’aux cavernes de l’aigle (washi-no-iwaya) et de la flûte céleste (Shô-no-iwaya). Cette halte se trouve à deux kilomètres du 64. A droite le sentier continue jusqu’au sommet et derrière se dévoile le mont Sanjo majestueux. Le mont Fugen portait le nom de « montagne aux nuages violets » (Shisuin-zan). Avant il y avait un gîte qui n’existe plus à présent. En direction de la vallée, En-no-gyoja y enferma un sutra du lotus dans une cache en pierre.

Poème du shugen:

« Miné to oshi fushi ogami yuku tani kasé ni fugen no chikai tanomoshiki kana »

(Faire les déambulations dans la montagne à la recherche du satori,est un long chemin, le vent qui souffle dans la vallée est semblable à celui des passions qui s’en va, le vœu de Fugen est transcendant)

 

Dans le sutra « des guirlandes de fleurs » de l’école Kégon, le maître Zenzai Doshi raconte comment il reçu l’enseignement du bodhisattva Fugen (Samanthabarda) après avoir prier le bouddha aux quarante trois places saintes. Il est écrit dans le sutra de Fugen Bosatsu que tous les êtres possèdent l’état adamantin (Jobodai-Shin) et explique quelles sont les voeux de Fugen qui lie ce dernier aux hommes. Sur l’entée du chemin bouddhique, Fugen est celui qui aide à faire les premiers pas. Il est représenté dans l’iconographie chevauchant sur le dos d’un éléphant alors que le boddhisattva Monju, son acolyte dans la triade du boddhisttava Kannon

(Avalokiteshvara en scrt), Manjusri en scrt, lui chevauche sur le dos d'un lion!

 

Les 10 voeux du bodhisattva Fugen (Samanthabarda)

- Il enseigne comment respecter et vénérer tous les bouddha

- Il enseigne comment chanter la grâce du bouddha

- Il montre comment faire les offrandes à tous

- Pour ceux qui font pénitence, il prend sur lui les crimes issus du karma

- Il favorise le bonheur en développant la réception des mérites

- Son souhait est la protection de la « roue de la Loi » (Temporin)

- Il fait le voeu pour qu’un bouddha surgisse en ce monde

- Il protège pour toujours on puisse suivre et étudier l’enseignement de bouddha

- Il regarde toujours dans la direction des fidèles

- Il est le gardien du transfert des mérites pour tous

 

Voici une histoire à propos de cet endroit:

«A la fin de l’époque Heian, du mont de Fugen jusqu’au hall de Zao sur le mont Sanjo, un grand éclair surgit dans le ciel. Un moine qui vivait dans la chapelle fût surpris ey s’interrogea sur ce signe. Il suivit cette ligne lumineuse jusqu’au mont de Fugen. Il y trouva huit exemplaires du sutra du lotus (8 parchemins en rouleaux) écrits de la main d’En-no-gyoja qui sortaient de la roche du mont Fugen. Ces textes rayonnaient de cent feux. Il fit des rites de protection, les prit et les emmena dans la chapelle de Zao. Un jour le ciel s’assombrit et ce fut la nuit . Une pluie de neige noire s’abattit, ainsi qu’un éclair. Lorsque tout redevint normal quelques minutes plus tard, les textes avaient disparus. Le moine pensa que le dieu-dragon (Ryujin) les avait ramenés au ciel.»

Poème du shugen:

« Ko-Fugen daké ni ikoéba ara arashi yama no takébi kumo ashirasu »

(Me rendant au Petit mont de Fugen, la voix de la tempête fit courir les nuages)

 

 

62) SHÔ-no-IWAYA (La caverne de la grotte de la flûte céleste). C’est une caverne qui se trouve versant sud-ouest derrière le mont de Fugen, sur un sentier abrupte qui mène au gîte de Wasamata. Elle se trouve à trente minutes de marche du N° 63. Célèbre lieu de retraite d’ermites et de moines japonais connus comme En-no-gyoja, Sugiwara Michizané (poète qui fût divinisé plus tard sous le nom du dieu shinto Kita Tenjin Tenmangu, devenu le protecteur des études, car c’était un des cinq plus grands calligraphes du Japon), les moines Nichizo (Doken de son premier nom de moine bouddhiste lorsqu'il prit la tonsure) et Gyoson (célèbre pour les poèmes qu’il laissa), Saigyo Hoshi, le Saint Jitsukaga, etc…Sur trois kilomètres, le chemin est très raide. La descente est dangereuse et la montée dans l'autre sens, plus qu’éprouvante. Il faut quarante cinq minutes pour monter de la grotte de Shô jusqu’à Waki-no-shuku, ce qui fait dire aux ascètes que la porte d’entrée du bodhisattva Fugen est dure à passer mais qu’une fois franchie, elle est sûre ! Dans les pratiques ésotériques, les rites préliminaires concernant les bodhisattva Fugen et Monju (Samantabardha et Manjusri) sont importants.

 

Dans le dictionnaire du Shugendo (shugendo daijiten), il est écrit à propos de la caverne de Shô : "Elle était souvent le lieu de retraite des « Misoka-yamabushi »", les yamabushi qui passent le jour de l’an en retraite, dans la neige et le froid ! Vu les températures extrêmes en hiver, située à 1400 mètres d’altitude, orientée vers les dépressions en provenance de l'océan pacifique, au sud-ouest, beaucoup de neige en hiver, jusqu’à plusieurs mètres, ces « Misoka-yamabushi » étaient considérés par l‘ensemble du shugendo comme des êtres d’une robustesse exceptionnelle. "Il y a plus de 900 années, le moine saint Nichizo, âgé de douze ans seulement, se rendit sur le mont Kimbusen (Kinpusen) pour y devenir moine (Sukké-Hoshimon-Chizanji). Puis il fit l’ascèse dans la caverne de Shô et y rencontra Zao-Gongen qui lui dit que sa vie pouvait être rallongée s’il changeait son nom de moine Doken pour celui de Nichizo. Il y rencontra en vision l’esprit de Sugiwara Michizané devenu le dieu Kita Tenmangu et vit l’empereur Daigo qui brûlait en enfers".

 

Voici le poème du saint homme Nichizo Shonin qu'il écrivit lors de son ascèse dans la caverne de Shô. Pour moi qui y suit resté 100 jours durant en y pratiquant l'ascèses, il illustre le mieux l'esprit dans lequel se trouvent les individus lorsqu'ils y font une longue retraite...Bon nombre de pratiquantes émérites viennent y faire une retraite de 7 jours...

 

« Séki bakuno koké no iwaya no shizuké sani namida no amé no fura no hizo naki”

(Tous les jours dans la solitude, avec seule compagne la mousse de la caverne, nombreuses sont les larmes du bouddha Amida)

 

Une mousse de couleur verte millénaire en tapisse la voûte. Avec son ouverture face aux intempéries les pluies des typhons s’engouffrent dedans sans ménagement. Les eaux de pluie et d’infiltration font que l’eau coule de la voûte, même en été, d’où un taux d’humidité extrême de 100% Avec une altitude où la température est relativement fraîche la nuit. C’est un endroit d’ascèse redoutable. Sont-ce les propres larmes de Nichizo (dues à la sévérité de l’épreuve), ou bien les gouttes d’eau qui suintant de la voûte? Toujours est-il qu’en direction de l’Ouest, c’est bien du bouddha Amida qu’il s’agit. Le moine Gyoson Dai-sojo était le fils d’un personnage historique célèbre dans le Japon médiéval Minamoto-no-Motohira.

L'Archevêque Gyoson, né en 1054, mort à 81 ans, à l’époque on mourait jeune vers les quarante ans, devint moine tardivement, à l’age de vingt ans. Il étudia les trois écoles bouddhiques de Nara, Kégon, Hossho et Ritsu. Il adorait les pèlerinages et particulièrement ceux dans les montagnes de l’Ominé, Katsuragi et de Kumano. Il est connu pour avoir eu recourt à des jeunes femmes, des vestales (miko-san) pour ses oracles.

 

Poème de l’archevêque Gyoson, lors de sa retraite à la caverne de Shô :

« Kusa no iyori nani tsuyu késhito omoi ken morano iwamo sodéwa nurékéri »

(Dans la maison de végétal, la rosée est partout, il n’y a pas d’orifice au plafond et pourtant mes manches sont trempées)

 

Le maître Saigyo Hôshi y réalisa ce poème :

« Koyo-i-koso, kolomo-mo atsuki kolomochi shité arashi no otô oyosoni kiku kana »

(Mon vêtement est trempé, comme mon esprit emplit de la compassion du bouddha, au dehors gronde la tempête, mais que cela me semble loin…)

Le maître Saigyo devait être en méditation profonde pour ne pas ressentir la tempête, car la caverne, peu profonde, protège très mal des pluies diluviennes des typhons. Au 20ième siècle seules quatre religieux ont tenté et réussit la triple ascèse des cent jours dans la caverne de Shô, avec déambulations quotidiennes en récitant des mantra (Hyakunichi komorukaihogyo): Le révérend Yanagi du temple Noten de Yoshino, le moine Kando* du temple Kimpusen, mon maître d'ascèses, le supérieur du temple Kizoin, le Révérend Nakai et moi-même. J'y ai rédigé trois cahiers de notes que je n'ai pu lire à nouveau que douze années après les avoir rédigés, tellement cette ascèse fût éprouvante, "Journal d’un voyage en enfers » (Jigoku-tabi-no-niki)... Dans cette caverne, il y a une statue d’En-no-gyoja et un Fudo Myo en pierre.

Dans le même secteur se trouve aussi «La caverne du soleil levant » (Asahi-no-iwaya, plus en contrebas que Shô en direction de Wasamata) et celle de l’aigle (Washi-no-iwaya, un peu plus haute sur le sentier). Celle de l’aigle est l'endroit où En-no-gyoja convertit les deux démons Zenki et Goki qui devinrent ensuite ses disciples. Les aigles royaux en grand nombre à cette époque à cet endroit ont à présent migré vers les roches de Goku Rakkan du refuge de Jinsen.

DIAPORAMA from mount Sanjo to Wasamata lodge house

 

C’est souvent par le chemin du gîte de Wasamata, passant devant la caverne de Shô et qui rejoint le mont de Fugen, que les femmes rejoignent les hommes, après avoir contourné le mont Sanjo et que le groupe se reforme vers le n°58.

 

Nuit à WASAMATA

 

 

VIDEO from mount Sanjo to Wasamata lodge house.

 

 

Journée 22 juillet****

On refait la dure montée du Mt Fugen par la caverne de Shô (1 heure)

 

61) MIROKU-DAKE (le mont du bouddha Miroku-Maitreya)

A environ un kilomètre de marche du mont Fugen, en continuant le chemin des crêtes, c’est un endroit difficile nommé «Miroku-no-yoko-gaké » (Miroku, la montée en travers, de coté).

Sur le mont de Miroku, il y a un autre endroit délicat, nommé Satsuma-korogi. On raconte que le seigneur du clan de Satsuma, au sud de l’île de Kyushu, lorsqu’il vint en pèlerinage à l’Ominé, glissa à cet endroit. Une autre place est nommée Naiji-otoshi ou Uchi-samourai ! C’était l’endroit que choisissaient certains yamabushi exténués par le miné-iri, pour se suicider en se jetant dans le vide afin de ne pas ralentir le groupe. C’est possible que ce soit aussi un endroit où l’on se débarrassait des "indésirables" qui avaient pu se glisser parmi les rangs.

C’est à cet endroit, lors de mon premier pèlerinage avec les yamabushi du temple Shôgôin en 1989, que j’ai commencé à ressentir de fortes douleurs dans tout le corps!

Poème de Saito sensei :

«Taniko to yuwa kibishi kumo hônaréba miyo tani nagu yamabushi awaré»

(Quelle loi sévère que celle qui oblige à plonger dans la vallée, tristesse des yamabushi)

 

 

60) CHIGO-DOMARI (halte de Chigo)

C’est un petit terrain dégagé sur le chemin de crêtes, avec de l’herbe. On y trouve une statue de Kongo-dôji, enfant de la classe de vajra, acolyte du bouddha Fudo. A cet endroit demeuraient sept petits lacs, aujourd’hui asséchés. Il se trouve à cent minutes à pied du mont de Fugen.

Poème de Saito Sensei

« Chiko domari ikoéba yasashi shiba-kusa no kazé ni soyogité koni tachi ni kéri, oinaru yama futo koroni idakarété ôni manda no nyu moi no méri »

(A Chiko-tomari, le vent apporte les douces et agréables effluves de l’herbe ; la montagne est grande et nous enveloppe ; peu à peu nous obtenons l’enseignement bouddhique comme on baratte le lait pour l’obtention du beurre, c’est la meilleure façon.)

A propos des 7 lacs recouverts d’herbes maintenant et qui se trouvaient sur la gauche, lorsque l’on est face à la statue, la première histoire raconte qu’En-no-gyoja se rendant pour la première fois dans les monts Ominé y trouva un grand serpent qu’il subjugua et jeta dans ces lacs. La seconde mentionne la même histoire, mais cette fois avec le maître Rigen lorsqu’il réalisait l’itinéraire en sens inverse. Ces lacs sont liés aux mythologies du serpent qui créé des problèmes et posent des entraves sur le chemin, peut-être les religions autochtones.

 

Poème de Saito Sensei :

«Nana-tsu iké imawa karéaté kusa fukami furishi kai iyo kokoni tsutaoru »

(Des 7 lacs asséchés, de hautes herbes s’y trouvent à présent qui parlent d’histoires fantastiques)

Lors du pèlerinage, on y prend son déjeuner matinal (obento fait de boules de riz) car il est environ 7 heures à cet endroit.

 

 

59) SHICHI-YÔ-DAKE ( la montagne des 7 jours de la semaine)

C’est un endroit très délicat depuis le moyen âge, au point que les yamabushi lui ont donné cet autre surnom «Nembutsu-Bashi », le pont de la prière Nembutsu; faisant allusion à la prière adressée au bouddha Amida, qui règne sur les paradis des défunts, dans les terres de l’Ouest. Lorsque l’on franchit cet endroit, on doit dire : «Namu Amida Bustsu » Adoration au bouddha Amida.

2011

1989 at Nembutsu bridge with Gomonshu Miyagi

 

Poèmes de Saito Sensei :

« Kuni minaru nembutsu bashini iko no mité ; tani yuku kumo ni ashi na énikéri. »

(Etre saisit d’effroi en regardant le pont du Nembutsu à cet endroit ; les nuages qui vont dans la vallée me rendent les jambes mortes)

"Séséra géni koé ari ishi no kokoro ari ; Haku-un yuyuso ten oiku"

(La voix des eaux, la pierre de l’esprit, les nuages blancs surgissent et semblent aller dans le bleu du ciel)

 

Un poème ancien dit ceci:

« Aré mo mata mizu no saga kai okaga oité miné ni nagaru ruhito ira no kumo »

(Par les pluies, l’eau des nuages retourne à l’eau de la terre ; la montagne la reçoit et la garde ; les pierres la filtrent pour la purifier, ainsi que la mousse pour la redonner à la terre).

Auparavant les shugenjas faisait des fêtes religieuses (matsuri) pour rendre hommage aux divinités de l’eau comme Benzai-ten, Ryujin et Suiten (eaux du ciel), commémorant ainsi le cycle de l’eau. A présent, cela est différent, fait remarquer Saito sensei.

Nenbutsu bridge july 2011

 

 

58) GYOJA-GAERI (l’endroit où En-no-gyoja rebroussa chemin) (si pluie filet d'eau)

Se trouve à environ 1h 40 minutes du n°60! C'est l'ascension à ce sommet par la falaise qui fit rebrousser chemin à En-no-Gyoja! Le sommet se nomme « le pic du sabre » (Kengataké). En fait à présent, dans le sens nord-sud, durant plus de vingt minutes, on descend des escaliers faits de poutres en bois ou en fer, longeant un canyon. S'il a plu quelques jours avant, ici on peut trouver un mince ruissellement d’eau pour y remplir ses gourdes. Après le n°62, c’est l’unique point d’eau, sinon il faut patienter jusqu’à l’arrivée au mont de Misen, en fin de journée. Si l’eau ne coule pas les yamabushi ont quelques trucs : Regarder le sens de l’écoulement de l’eau puis creuser ou bien briser les plantes qui retiennent l’eau…

 

Un homme construisit une superbe hutte une année qui fut détruite l’année suivante; "aucun yamabushi ne ferait cela" remarque Saïto Sensei. "En montagne, à présent, il n’y a pas que des yamabushi", me dit-il....

On y vénère les « huit grands enfants du Vajra », acolytes de Fudo-Myo (Hachi-dai Kongo-dôji). Ce canyon voit à présent ses échelles en bois accrochées à la paroi, on comprend qu’en venant de l’autre sens, tombant sur un à pic, les ermites aient rebroussé chemin!

 

57) ICHI-NO-TAWA (la première crête)

Avant il y avait de l’eau, on y prie l’un des assesseurs du vajra Sosei Kongo Dôji.

A 70 minutes du n°58, Saito sensei y a écrit :

«Onézu no tôu madarani zashiya sho itotsu kumazasa no uéo ukité tatayou »

(La lumière des rayons du soleil filtre à travers les branches, un papillon flotte au-dessus des bambous)

«Shakujo no hibiki sayakani ibikai ité kenja rashi yukyuto tawa otachi yuku »

(Le ronflement du sistre est clairement perçu, les shugenja s’en vont à la première crête)

Ces deux poèmes indiquent clairement que le miné-iri est devenu un chemin de crêtes avec un sous bois avec un sol moins accidenté, comme avant pour «Waki-no-shuku» au n°64. Certainement que les shugenja s’y sont reposés puisque le ronflement du bâton à anneaux y est mentionné.

 

56) SEKIKYU-NO-YADO (halte de la pierre du repos)

Il existe un chemin qui part de la caverne de Jimpen (autre nom pour la caverne de Shô) qui passe par le n°58 en bas et qui débouche au n°56, évitant les crêtes.

On se trouve à présent devant le mont Misen, le mont Suméru de la mythologie indienne (l’axe du monde), qui est la seconde plus haute montagne dans la péninsule de Kii, mais celle où se trouve un refuge afin d'y passer la nuit. Mais ni douche ni bain ni eau même pour se laver, car l'eau est si pécieuse ici qu'elle n'est utilisé que pour boire et cuisiner. Les orages s’accrochent souvent à cette montagne. Il y pleut presque tous les jours en été, et c'est leau de pluie qui est récupérée !

 

 

55) SHOBO-HACHO ou KOBASEI-YADO (la pente du maître Rigen ou le refuge de l’archevêque Kobasei)

C’est le début de la montée du mont Misen. Il s’y trouve une statue du moine Shôbô (d’où le nom de cette montée) qu’il faut éviter de toucher sinon la pluie vient indique la tradition. Une fois que les guides ont donné les explications de ce site, il y a souvent malheureusement un néophyte, qui à l’abri des regards des autres, touche la statue, donc il se met ensuite à pleuvoir… Il y pleut généralement tous les jours car le pèlerinage du temple Shôgôin se déroule à la saison des typhons en septembre. Mais pour nous qui avions décidé de le faire durant la troisième semaine de Juillet, à un moment où normalement il n'y a aucun typhon, nous avons eu droit en pleine montagne au 6ème typhon de l'année: le changement climatique se fait ressentir même au Japon...

Il y a deux histoires dans la tradition de l’école Honzan à propos de ce lieu : "un prêtre du nom de Kobasei de la ville d'Ida dans la préfecture de Gifu (en limite des Alpes Japonaises, à cent kilomètres au nord-est de la ville de Nagoya), voulait devenir Archevêque. L’empereur s’y opposa et Kobasei lui jeta un sort!" L’autre histoire raconte qu’un archevêque du shugendo : "Kobasei Sôjô y avait sa tombe ici ainsi qu’une statue en bois le représentant. Il n’y a plus ni l’une ni l’autre à présent!"

 

Poème de Saïto Sensei

«Wage Soshi wa bikuni shiarédo tsurugi obi shugen no michi oiraki tamaéru. Amé otsuki tadoritsuki taru Kobaseio no muné otsuki sémaru Shobo hacho. Deinei ni kokétsu marobitsu ita noboru Shobo hacho, amé-yamé-tamé »

(Mon jeune maître était un moine qui portait le glaive droit et ouvrait la voie du Shugen. Une pluie frappante oppressait la poitrine de Kobansei sur la montée étroite de Shôbô. Grimper "Shôbô hacho" avec la tête pleine d’eau; faites que la pluie cesse). Cette dernière phrase : « deinei ni kokétsu marobitsu ita noboru Shobo, amé Yamé Tamaé ! » indique très clairement que le sentier était (est) toujours très glissant et que le fait de glisser ici ne date pas d’hier. Un diton raconte qu’à 20 ans, il faut 20 minutes pour parvenir en haut, à 40 ans, il faut 40 minutes, à 60 ans, il faut une heure. Le dicton s’arrête à 60, cela voudrait-il dire qu’arrivé à 70 ans, il faille renoncer à grimper dans les monts Ominé ? Cela doit sûrement être vrai puisque tous les dignitaires du Shugendô arrêtent d’aller en montagne vers cet âge...

 

GO GO go alone to the summit: Yamabushi race!

18 years old=18 minuts, 30 years old=30 minuts... over 60 minuts, necessarry to stop the pilgrimage here...

 

 

54) MIE-SEN (le mont Mérou ou Sumérou)

Altitude 1895 mètres, c’est le second plus haut sommet de la région qui va de Nara à Kumano. On y trouve un grand refuge, refait à neuf il y a quelques années. Tout au sommet se trouve le sanctuaire profond (Oku-no-in) du temple dédié à Hamakawa-Benzaiten (déesse des arts) du village de Tenkawa. Le pic est dégagé, avec une vue claire jusqu’à Osaka par temps ensoleillé! C’est la déesse qui apporte l’eau au dieu du sol, Mikumari. Lorsqu’En-no-gyoja fit sa retraite sur le mont Sanjo, c’est elle qui lui apparut la première. Après sa répudiation par En-no-gyoja, elle établit son refuge ici. Au sommet se trouve une dalle en pierre plate appellée "Pierre de la posture correcte" (zazen-ishi) et un endroit dégagé pour les pratiquants depuis des siècles (gyoja-sugata-miké) d’où ils étaient censés apercevoir leur maison, dans le lointain, vers la ville d’Osaka…. Ici les néophytes doivent demander aux anciens pour prendre l’eau de source car elle ne sert qu’a être bu ou pour la cuisine. Par manque d’eau, personne n’est autorisé à se laver. Depuis le moyen-âge les yamabushi n’enfreignent pas cette loi de peur de voir se tarir la réserve de la petite mare qui se trouve derrière le refuge. Le 16 juillet, tous les ans, il y a un festival des fleurs pour la déesse Benzaiten.

 

Poème ancien du shugen:

« Yobo tô nagaruru kirini tatazu nité genshi no koé o miné ni kiki iru bubo stsu enzashita ma ou miné naréba misen toyuni fukaki yuéari kuroguro to ukabéruminé no tsuki ya karé ni furi tamaéya. Eko bosatsu tenku ni kagayaku tsuki ni namu kaité muné no uchi naru otoké omou »

(Dans l’épais brouillard, pour écouter la voie ancienne de la montagne au sein de laquelle se côtoient Bouddhas et Bodhisattvas. Dans le mot de Misen (mont Mérou) se trouve un enseignement profond et secret. S’il vous plait, que Géko-Bosatsu, (Boddhisattva de la Lune) vienne avec la lune dans un endroit illuminé, pour apercevoir la lune dans le ciel et le Bouddha dans le coeur)

L’enseignement secret dont il est clairement fait mention ici est la cosmogonie de l’axe du monde et la méditation sur le disque lunaire (Gachirin-kan) qui mène à l’autre stade méditatif : La méditation sur les lettres sanscrites, Bonji-kannen ou Bongo-meiso. C’est ici que les yamabushi passent leur troisième nuit du pèlerinage. C’est au sommet de cette montagne, (ne sachant rien à l’époque du symbolisme des 75 stations, lors de mon premier « miné-iri») que je suis tombé d’inanition due à la fatigue. Durant quelques minutes (les sendatsu me le racontèrent ensuite) tout le monde a craint le pire, car on ne pouvait trouver mon pouls et j’étais très pâle sans battements cardiaques audibles. Je pense qu’ici, sur la montagne de l’Axis-Mundis, j’ai fait ma première expérience de la « petite mort » ! On dit qu’il en faut 7 dans une vie si l’on espère devenir un bouddha ! Il est à noter que chaque « petites morts » ont l’air de rythmer les phases importantes de la Vie…

 

 

 

 

 

 

DIAPORAMA / VIDEO from Wasamata to mount Miesen

Photograph Masahi FUJIMOTO 2008

 

Shomudo-An Okugake 2011

 

 

 

(Nuit à Miesen)

 

 

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